Ce que j'ai à dire; ce que j'ai pu lire

tout est dans le titre. Et par moment, j'ai même à dire sur ce que j'ai pu lire.

Ma photo
Nom :
Lieu : France

lundi, mars 20, 2006

le port des signes religieux

Courrier international - n° 802 - 16 mars 2006

CANADA - Le poignard sikh autorisé à l’école

Les élèves sikhs orthodoxes pourront dorénavant se rendre à l’école avec leur kirpan, un poignard traditionnel dont le port est prescrit par leur religion. Dans un verdict unanime rendu le 2 mars par la Cour suprême du Canada, les juges affirment : “L’interdiction totale de porter le kirpan à l’école dévalorise ce symbole religieux et envoie aux élèves le message que certaines pratiques religieuses ne méritent pas la même protection que d’autres.” Cette décision met un terme à la saga judiciaire provoquée par l’expulsion du jeune Gurbal Singh Multani de l’école publique en 2001.

Le jugement de la Cour suprême n’en a pas moins provoqué un malaise dans la société québécoise. Alors que le multiculturalisme canadien affirme le droit de pratiquer sa religion en public comme en privé, 6 Québécois sur 10 s’opposeraient au port des symboles religieux à l’école. De nombreuses décisions juridiques ont néanmoins garanti ce droit – le port du voile islamique est notamment autorisé par la loi depuis 1995.

Si une majorité d’éditorialistes soutient le verdict, certains chroniqueurs s’indignent. “Avec quels arguments peut-on convaincre les gens du bien-fondé de l’interdiction de réciter une prière avant la classe ou avant les travaux d’un conseil municipal alors qu’on permet à un enfant de porter une arme – à ses yeux, un symbole religieux ?” s’interroge l’écrivaine et chroniqueuse Denise Bombardier dans Le Devoir. “La Cour suprême, contrairement à ce qu’on pense, n’a pas tranché dans l’affaire du kirpan : elle a plutôt glissé sur la pente savonneuse de la rectitude politique”, assène-t-elle.

Les juges ont rejeté les arguments sécuritaires invoqués par les autorités scolaires, affirmant qu’aucun incident impliquant le kirpan n’a été constaté en un siècle de présence sikhe au Canada. Leur décision exige néanmoins que l’objet soit porté sous les vêtements, inséré dans un fourreau en bois et enveloppé dans un étui de toile cousue.

Pourquoi ce verdict provoque-t-il tant de réticences, se demandent les journaux québécois ? Selon certains experts, le caractère récent de la laïcisation dans la Belle Province exacerberait la sensibilité au retour du religieux. “D’un côté, il y a le Québec qui déconfessionalise tout, et de l’autre, de nouvelles communautés qui n’ont pas mis en place ce processus”, explique une fonctionnaire. Par conséquent, le débat sur le voile a été suivi de façon attentive par les médias de la province francophone. Pour un éditorialiste de La Presse, “le jugement de la Cour suprême porte un ultime message : il faut continuer à lutter pour la laïcisation de l’espace public”. Pour l’homme de la rue, le message est sans doute plus terre à terre. Comme le souligne Le Devoir, “un couteau est un couteau”.